Après trois années de combat acharné auprès de la municipalité d’Argenteuil pour qu’elle rende hommage à l’artiste céramiste Roland Brice et à son œuvre monumentale détruite illégalement en 2010, j’ai le plaisir de vous inviter à l‘inauguration de la stèle commémorative qui aura lieu le samedi 19 septembre 2015 à 15h30, allée Romain-Rolland, devant le collège Lucie Aubrac à Argenteuil.
Pour télécharger l’invitation, cliquez ici.
Il est beaucoup question actuellement dans les médias de destructions d’œuvres du patrimoine notamment en Syrie, en Libye, en Irak, à Tombouctou, de mausolées détruits, de sites archéologiques pillés, de sculptures saccagées, de statues mutilées, dynamitées et d’une inquiétante progression de ces crimes contre la civilisation qui rappellent de très près la memoria damnata romaine. Alors que nous apprenons et assistons passivement à la disparition de ces œuvres au Moyen-Orient, nous oublions que la même chose se produit ici même, en France, chaque année et ce, depuis des décennies. Dans l’indifférence la plus totale et le mépris des lois les plus élémentaires, notre belle nation des Droits de l’Homme détruit chaque année de nombreuses œuvres de notre patrimoine artistique et culturel. Naturellement, ces destructions, souvent moins spectaculaires que celles perpétrées au Moyen-Orient, n’attirent que très peu l’attention des médias ou du public, plus enclin à se laisser bercer par les si «rassurantes» Journées du Patrimoine….
Quoi qu’il en soit, ces destructions qui ont bien lieu en France, un peu partout dans de nombreuses communes, nous privent à chaque fois un peu plus des richesses artistiques dont nous sommes les dépositaires, richesses perdues que nous ne pourrons plus transmettre aux générations à venir et dont nous ne pourrons plus rien apprendre. Ce constat est affligeant, alarmant.
En l’absence de volonté politique en faveur de la préservation du patrimoine artistique placé dans l’espace public (et de façon plus générale du patrimoine culturel et architectural), les œuvres se dégradent, ne sont plus entretenues, sont aussi victimes d’un vandalisme honteux et finalement sont laissées la plupart du temps à l’abandon. La destruction reste, semble t-il, la seule réponse des pouvoirs publiques aux erreurs et aux manquements des obligations des municipalités en matière de préservation et de conservation des biens qui leur sont confiés. Ces destructions sont souvent effectuées en deux coups de pelleteuses, discrètement, à l’insu de tous et sans concertation avec les ayants-droit des artistes. Aucune mesure n’est envisagée pour tenter de sauver ces œuvres plutôt que de les détruire. La mémoire des artistes est alors bafouée, piétinée, et nos trésors saccagés, à jamais perdus.
L’hommage que j’ai demandé à la municipalité d’Argenteuil et qu’elle a accepté de rendre à l’œuvre et à la mémoire de Roland Brice le 19 septembre prochain, se veut être un signe fort et symbolique dans une société qui dilapide littéralement ce que des hommes ont mis en place et nous ont légué depuis des siècles. La municipalité d’Argenteuil a certes reconnu le préjudice commis, ce qui est encourageant mais l’œuvre est toutefois définitivement perdue. D’autres communes de la région parisienne comme Bagneux et Villejuif se sont conduites comme des voyous à l’égard des œuvres qu’elles auraient dû protéger. Ces municipalités ont elles aussi détruit illégalement des œuvres importantes de l’artiste Roland Brice. La commune de Vitry-sur-Seine laisse, quant à elle, se dégrader les dernières sculptures monumentales pour lesquelles l’artiste céramiste Brice avait tant œuvré afin d’apporter de la couleur dans la grisaille des cités de béton érigées après-guerre. La commune de La Courneuve, pour sa part, a bien réhabilité récemment une œuvre de l’artiste, mais pendant de nombreuses années en a laissé une autre se dégrader au point d’en être réduite à l’état de gravats, ce qui est tout simplement inadmissible.
Cette date du 19 septembre n’est donc pas uniquement un rendez-vous, c’est un signal, un appel à la prise de conscience et surtout une incitation à l’action tel un combat que chacun de nous devrions mener pour préserver les œuvres encore en place et honorer celles qui sont abattues sans aucun respect du sens ni des richesses de notre patrimoine artistique et culturel. Comme je ne cesse de le rappeler lors des conférences que j’assure à ce sujet, notre patrimoine est un enjeu de civilisation et il nous concerne tous.
Contact : Rodolphe Cosimi, Critique d’art Aica France, Président de l’Association des Amis de Roland Brice : [email protected]