Les images ultra-violentes de délinquants mineurs brandissant des armes de guerre déferlent sur tous les écrans. Impossible d’échapper à ces scènes de western. Désormais, après des années durant lesquelles les autorités « relativisaient » les statistiques de la criminalité, il existe un consensus dans l’opinion sur la réalité des actes de violence urbaine.
Le rôle des journalistes n’a jamais été aussi crucial depuis le Conseil national de la Résistance (CNR). Le respect de l’éthique, prôné par le CNR, bien malmené, demeure une priorité : informer et analyser l’ampleur réelle de la criminalité en France.
Un défi. Tant que les adeptes de la surenchère sécuritaire séviront dans de nombreux médias. Ils profitent de l’effet émotionnel des réseaux sociaux. Fait paradoxal : la délinquance des mineurs diminue en France mais les actes les plus violents augmentent.
Le Monde, fort de ce constat, a réalisé une remarquable étude. Dans sa rubrique « Les décodeurs », un outil de travail rigoureux dans lequel les articles sont construits avant tout autour de faits les plus objectifs possible : statistiques, chiffres, lois, dates, sont le matériau premier. « Nous ne faisons pas de journalisme spéculatif, nous ne donnons pas notre avis ! », précise Grégoire Biseau.
Si depuis 2016, le nombre de mineurs poursuivis par la justice a baissé de 25 %, les actes violents, très minoritaires mais médiatisés, augmentent. La jeunesse française est-elle devenue de plus en plus violente, de plus en plus jeune ?
Assurément, estime le quotidien du soir. Selon des sources policières et de la gendarmerie, la délinquance des mineurs n’explose pas, c’est même l’exact inverse. Alors qu’en 2021 , 274 000 mineurs avaient été « mis en cause pour des infractions élucidées », ils ont été 228 000 en 2024, soit une baisse quasi linéaire de 16 %.
Force est de constater que les actes les plus violents chez les mineurs, très minoritaires mais médiatisés, augmentent, eux, assez fortement. Le nombre d’adolescents poursuivis pour assassinat, meurtre, coups mortels ou violence aggravée a ainsi quasiment doublé depuis 2017, passant de 1 207 à 2 095 en 2023.
Entre 2000 et 2019, le nombre de mineurs condamnés pour homicide ne dépassait jamais le nombre de trente par an (sauf en 2002 et 2007), il atteint le chiffre record de quarante-deux en 2022.
Cette avalanche de statistiques, souvent paradoxales, traduit l’extrême complexité de la problématique de la délinquance. Ce n’est qu’une première approche. Il convient à notre profession de « faire le job » avec une certaine humilité.
Terminons par une citation d’Albert Camus : « Une presse libre peut, bien sûr, être à la fois bonne et mauvaise, mais, très certainement, sans liberté, la presse ne sera jamais que mauvaise . »
Paul Barelli
Vice-président du CPM 06.
Ex correspondant du Monde dans les AM.