Treize morts et la raison d’état

CPM06 26 février 2025 0

Le 15 février 1989 dans le vieux Toulon, une violente explosion détruit un bâtiment de cinq étages faisant treize morts et plus de trente blessés. L’immeuble du XVIIème siècle était baptisé « Maison des Têtes » en raison de mascarons en bronze posés sur le fronton des fenêtres.

L’émotion est considérable, mais sur les lieux, aucun enquêteur n’est dépêché et au cours de la nuit, des camions vont déverser les déblais dans une décharge éloignée. Vingt-quatre heures après le drame, des éléments essentiels à l’enquête ont disparu. Bientôt, une hypothèse prend forme : le gaz. Mais GDF et les pompiers réfutent l’explication. Il n’y a eu ni flamme ni fumée ni brûlure. Personne n’a senti le gaz ni avant ni pendant ni après le drame, aucune fuite suspecte n’a été signalée à GDF.

Pendant cinq ans les enquêteurs vont alors bâtir un scénario incroyable à partir de cette hypothèse. Les inepties vont se succéder. Finalement, après d’infructueuses batailles judiciaires, le dossier est clôturé par un non-lieu en 1994 confirmé en appel en 1995.

En 2009, Max Clanet, journaliste d’investigation bien connu du CPM06 pour ses révélations sur le crash de la caravelle Ajaccio-Nice, est appelé par les familles des victimes. Il se rend compte rapidement que l’enquête officielle a été étouffée par la raison d’État. Aujourd’hui, trente-six ans après le drame, cette vérité n’est toujours pas remontée des abysses.

L’émission Affaires sensibles de France-Inter est consacrée à cette affaire. L’ossature est constituée par son ouvrage Blessures de guerre. Il l’avait publié en 2014 et republié en avril 2024. L’ouvrage raconte comment l’enquête officielle a été étouffée dès les premières heures afin que l’on ne puisse jamais connaître la vérité sur ce drame. Il y détaille la contre-enquête qu’il a menée durant cinq ans. Une contre-enquête parsemée d’embûches, de dissimulations et de mensonges. Malgré l’aide de parlementaires de renom, le ministère de la Défense verrouilla totalement l’accès aux informations. Le sénateur Robert Hue avait indiqué en 2014 : « Le livre Blessures de guerre du journaliste Max Clanet que j’ai rencontré à plusieurs reprises m’a ouvert les yeux sur cette triste affaire ». Vice-président de la Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, il écrivait en 2016 au ministre de la défense « Le livre Blessures de guerre explique que des informations ont été classées définitivement, je vous demande la levée du Secret-défense sur cette affaire ». La demande ne sera suivie d’aucun effet.

L’ouvrage Blessures de guerre est disponible sur le site Amazon.fr.

Voici le lien de l’émission qui est aussi disponible sur le site internet :

https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/affaires-sensibles/affaires-sensibles-du-jeudi-13-fevrier-2025-8084441

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