Captivant, très documenté, cet ouvrage de deux journalistes, amoureux de la Petite Reine, André Baudin et Julien Camy ne s’adresse pas qu’aux amateurs de cyclisme. Mais bien au-delà, ce sont des pages d’histoire récente de la Côte d’Azur, truffées d’anecdotes que dévoilent nos deux confrères. Une aventure humaine émouvante. Grâce à ce récit inédit, le lecteur croise des champions, des cyclistes oubliés, des courses disparues et des exploits souvent insensés.
Au moment où Nice a accueilli, pour la première fois depuis 1981 le Grand Départ du Tour de France, les images emblématiques d’immenses champions ressurgissent au fil des pages, tels Fausto Coppi, Louison Bobet, Jacques Anquetil, Bernard Hinault, Lance Armstrong, Richard Virenque ou Christopher Froome… Sans oublier les hommes du cru de Jean Novo à Charly Bérard. Et le plus légendaire d’entre eux : René Vietto, l’enfant du Cannet que l’écrivain Niçois également passionné de vélo Louis Nucera célébra avec le Roi Renépublié en 1976.
René Vietto est certainement le plus grand coureur cycliste que la Côte d’Azur ait connu. En explorant sa légende, les auteurs nous mènent sur des chemins escarpés en allant de surprise en surprise : « Pour moi, confiait René Vietto, c’est la campagne, la montagne, la solitude. Même parfois pendant le Tour de France, j’ai pensé à me jeter dans le ravin. Et pourtant, j’étais en tête (…). J’ai toujours aimé regarder le paysage et j’aurais aimé être peintre plus que coureur ». René Vietto était un artiste de son sport. Il avait en lui cette nécessité de rouler pour s’exprimer, comme un artiste de créer. C’était une question de survie, comme le soulignent André Baudin et Julien Camy.
Le tour de France est né en 1903 de l’imaginaire d’un jeune journaliste Geo Lefèvre qui suggéra à son patron directeur du quotidien sportif l’Auto de créer une épreuve hors du commun intitulée les Six Jours de la route sous la forme d’une course à étape reliant les principales routes de la France. Un seul niçois, François Poussel était au départ. Il avait payé 10 francs pour figurer parmi les engagés.
Ce premier Tour de France, il n’en a pas vu l’arrivée. Il abandonna dès la première étape qui menait à Lyon avec 23 autres participants. Absent des podiums il s’est « perdu depuis dans les lacets de la mémoire ».
La Grande Boucle était née. Elle franchira pour la première fois les frontières de la Côte d’Azur le 12 Juillet 1906. A Nice c’est la fête. Le journaliste de l’Eclaireur de Nice raconte avec lyrisme cette arrivée : un remous de la foule, une rumeur tout d’abord confuse puis, tout à coup le cri « le voilà ! ». René Pottier débarque en solitaire sur la promenade des Anglais dans un nuage de poussière et sous un soleil brûlant, après avoir lâché ses concurrents dans les cols précédents. Dans une ambiance de liesse, la foule acclame l’exploit de ce grimpeur ailé vainqueur à Nice qui se hisse ensuite sur la plus haute marche du podium à Paris.
Le livre foisonne de tels récits singuliers et devrait captiver un large public.
Paul Barelli
* Côte d’Azur. Terre de cyclisme. Editions Gilletta/Nice Matin